La Bible, l’homosexualité et les sciences cognitives: Vers une approche interdisciplinaire de l’homosexualité*

The Bible, Homosexuality and Cognitive Sciences: Towards an Interdisciplinary Approach to Homosexuality

Theologica Xaveriana, vol. 70, 2020

Pontificia Universidad Javeriana

Alejandro Pérez a

l’Université Catolique de Louvain, Bélgica


Reçu: 05/09/18

Accepté: 22/11/18

Résumé: Le titre de cette étude suggère de traiter trois termes, à premier vue, sans aucun lien. En effet, quel peut être le lien entre l’homosexualité et la Bible? Ou celui entre l’homosexualité et les sciences cognitives? Et finalement, quel lien peut-il y avoir entre ces trois termes à première vue juxtaposés? Il y a une réponse à chacune de ces trois questions et nous proposons d’explorer ces réponses dans le cadre de cette étude. Notre thèse consiste à défendre que les sciences et plus précisément les sciences cognitives peuvent contribuer à la discussion sur l’homosexualité dans un cadre théologique (et/ou ecclésial).

Mots clés:Homosexualité, sciences cognitives, Bible, théologie morale.

Abstract: The title of this study suggests treating three terms, at first glance, without any link. Indeed, what might be the link between homosexuality and the Holy Scriptures? Or what might be the link between homosexuality and cognitive sciences? Finally, what relationship can be there between these three prima facie juxtaposed terms? There is an answer to each of these three questions, and we propose to explore such responses in this study. Our thesis lies in defending that the science and more precisely the cognitive sciences can contribute to the discussion on homosexuality in a theological (and/or ecclesial) discourse.

Keywords: homosexuality, cognitive sciences, Holy Scriptures, moral theology.

RECONNAISSANCE

Nous remercions Dominique Jacquemin, Jean-Pascal Gay, Samuel Buitrago et Martin Dutron pour leurs commentaires et corrections. Nous remercions également deux évaluateurs anonymes de la revue pour leurs commentaires et corrections. Nous demeurons toutefois les seuls responsables des erreurs et limites que ce texte pourrait comporter.

ἰσάγγελοι γάρ εἰσιν καὶ υἱοί εἰσιν Θεοῦ τῆς

ἀναστάσεως υἱοὶ ὄντες (Lc 20,36)

INTRODUCTION

Le titre de cette étude suggère de traiter trois termes, à premier vue, sans aucun lien. En effet, quel peut être le lien entre l’homosexualité et la Bible? Ou celui entre l’homosexualité et les sciences cognitives 1 ? Et finalement, quel lien peut-il y avoir entre ces trois termes à première vue juxtaposés? Il y a une réponse à chacune de ces trois questions, et nous proposons d’explorer ces réponses dans le cadre de cette étude. Notre thèse consiste à défendre que les sciences, et plus précisément les sciences cognitives peuvent contribuer à la discussion sur l’homosexualité dans un cadre théologique (et/ou ecclésial). Le possible apport des sciences cognitives au discours théologique sur l’homosexualité, ne revient pas à plaidoyer pour une neuro-théologie 2 . La théologie, la philosophie ou l’éthique considérée chacune comme une science, ne doit pas devenir “neuro”, “bio”, “physi” pour être prise au sérieuse. Elle a juste besoin de dialoguer avec les autres sciences concernées également par les questions étudiées, pour en devenir 3 .

Ce dialogue n’existe néanmoins pas en tant que tel, au moins dans le monde francophone 4 ; il est mieux développé dans le monde universitaire anglophone mais il reste modeste. Plus précisément, il ne s’agit pas d’une voie étant explorée, bien qu’elle reste possible, voire nécessaire. Cet abandon est sans doute lié au manque d’études développées autour de la discussion sur l’homosexualité, cherchant à prendre en compte les travaux effectuées dans les sciences cognitives. Les causes sont nombreuses: la difficulté de faire dialoguer la science et la théologie, la perspective prise dans la plupart des travaux sur l’homosexualité en théologie, la peur ou la méfiance à l’égard des sciences, et notamment le peu de littérature et de recherches sur le sexe et l’homosexualité dans les sciences cognitives. Or puisque l’homosexualité peut être expliquée comme un phénomène neurologique et plus précisément biologique 5 , les sciences ont un mot à dire. Donc, notre étude consistera à montrer, quel est le possible apport que les sciences cognitives peuvent donner au discours théologique et à quelles conditions est-il possible. Nous développerons la recherche en deux étapes: premièrement nous introduirons brièvement la question dans une perspective théologique, en même temps que nous soulèverons les principaux problèmes auxquels nous devons faire face. Cela nous permettra d’esquisser une solution, point sur lequel nous conclurons la première partie. La deuxième partie constitue la suite de notre réflexion et de notre proposition. Nous présenterons ce que les sciences cognitives disent à propos de l’homosexualité, point qui vient appuyer notre proposition. Notre conclusion consiste à montrer que les sciences nous invitent aujourd’hui à nous remettre en cause sur un sujet qui a été traditionnellement traité de manière, sans doute, erronée.

Méthodologiquement, notre approche ne se réduit pas à une question herméneutique. En effet, notre intérêt consiste à identifier le raisonnement théologique et à l’analyser. À partir de ce passage nous proposons d’évaluer l’aspect méta-théologique de la question et le possible apport des sciences cognitives au discours théologique. Un dernier objectif consiste à souligner les conclusions de ce travail interdisciplinaire.

L’EVOLUTION DE L’HOMOSEXUALITE

Avant d’entrer dans notre sujet, commençons par rappeler quelques faits importants sur l’homosexualité 6 . Elle n’est pas à proprement parler une question récente 7 puisqu’elle a été tolérée à différentes époques et ce n’est qu’à quelques reprises de l’histoire qu’elle a dû faire face à l’intolérance 8 . En France, l’homosexualité fut considérée comme un délit jusqu’au 4 août 1982, lorsque la France supprime la pénalisation de l’homosexualité impliquant des personnes de plus de 15 ans 9 . Cela n’était pas un cas isolé ou propre à la France, car dans d’autres pays de l’Europe et du monde, l’homosexualité fut stigmatisée ou traitée comme un délit. Pour de nombreuses personnes, les conséquences furent quelques fois funestes. Ils furent souvent condamnés à une terrible fin; nous pouvons penser au cas médiatisé d’Alain Turing en Angleterre mais aussi à la persécution et déportation des personnes homosexuelles dans les camps de concentration 10 . La dépénalisation actuelle de l’homosexualité fut alors accompagnée d’une peur liée au surgissement de nombreuses questions associées à ce sujet: les analyses en termes de genre 11 , le mariage pour tous et l’adoption d’enfants par des couples de même sexe 12 . Toutes ces questions, bien que liées par un même sujet, tendent à dissiper le discours et ne nous permettent sans doute pas de considérer le sujet de façon isolée et objective.

Parallèlement à l’évolution de notre manière de voir l’homosexualité, la conception de l’homosexualité évolua et se développa dans le cadre scientifique. Or, comme Lemoine le souligne:

…c’est à travers l’univers médical des perversions que l’homosexualité a été souvent appréhendée depuis le XIXe siècle, ce qui semble insoutenable actuellement, même dans le dictionnaire de classification psychiatrique (DSM-IV) le plus récent à ce jour qui parle de “paraphilie” déconnectant ainsi, non sans efforts parmi les spécialistes, l’homosexualité de la perversion. 13

Donc, l’homosexualité fut souvent associée à la perversion (une influence sans doute freudienne ou post-freudienne), considérée comme une maladie, ou pis encore, comme le résultat “inapproprié des parents soit de décisions malsaines de l’enfant” 14 , en insistant sur la culpabilité des parents ou de la personne concernée 15 . Elle devient ainsi un sujet controversé, un cheval de Troie gouverné par différents intérêts. Ce n’est qu’en 1990 que l’OMS supprime l’homosexualité dans le cadre des maladies mentales et depuis 2013 le mariage de deux personnes du même sexe devient possible en France.

Malgré le retard des recherches scientifiques sur cette question, il y a eu récemment de nombreuses études menées qui montrent que:

…contrairement à ce que soutiennent des théories encore très répandues, généralement on ne devient pas et on ne choisit pas d’être homosexuel 16 : on naît homosexuel 17 . [Donc] L’origine de l’homosexualité est davantage à chercher dans la biologie des individus. 18

Les thèses psychanalystes, fortement en vogue 19 , se sont alors vues questionnées (ou rabaissées) par les sciences cognitives et par la biologie. C’est ici qu’on peut noter qu’un travail interdisciplinaire et sérieux doit être mis en place pour bien approcher la question. Les travaux biologiques ont notamment montré et insisté sur

…l’existence d’une base biologique à l’orientation sexuelle humaine. Selon ces études, cette orientation serait très probablement influencée par le milieu hormonal auquel est exposé l’embryon, en associant avec des prédispositions génétiques plus ou moins pénétrantes. 20

Ces travaux nous invitent à envisager que

…les orientations homo ou hétérosexuelles sont probablement chez l’Homme 21 comme chez l’animal sous le contrôle de phénomènes endocriniens ou génétiques embryonnaires dans lesquels la notion de choix individuel, de responsabilité et culpabilité n’a que peu de place. 22

Comme le laisse entrevoir Balthazar, la question est en train de se construire correctement et d’évoluer; il est néanmoins impossible aujourd’hui de parler d’un consensus. Sans doute, les sciences de la vie ont encore à nous dévoiler de nombreux mystères (e.g. l’ADN, la conscience, etc.). C’est pourquoi nous avons jugé nécessaire de nous en inspirer pour notre sujet, en espérant apporter une lecture pluridisciplinaire 23 .

L’INTERPRETATION THEOLOGIQUE

Avant de pouvoir comprendre l’importance du discours scientifique, présentons brièvement la question d’un point de vue théologique. Nous partirons de la définition donnée par le “Catéchisme de l’Église Catholique” 24 . Bien que, prima facie, ce choix semblerait injustifié, nous défendons son usage car nous prenons le “Catéchisme de l’Église Catholique” comme étant une représentation fidèle du raisonnement théologique et ecclésial – se fondant lui-même sur la Bible 25 . C’est le rôle qui lui est attribué: “…un catéchisme ou compendium de toute la doctrine catholique tans sur la foi que sur la morale” 26 .

Dans le paragraphe 2357, le “Catéchisme de l’Église Catholique” traite sur l’homosexualité et affirme:

2357 L’homosexualité désigne les relations entre des hommes ou des femmes qui éprouvent une attirance sexuelle, exclusive ou prédominante, envers des personnes du même sexe. Elle revêt des formes très variables à travers les siècles et les cultures. Sa genèse psychique reste largement inexpliquée. S’appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves (cfr. Gn 19,1-29; Rm 1,24-27; 1Co 6,10; 1Tm 1,10), la Tradition a toujours déclaré que “les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés” (CDF, décl. “Persona humana” 8). Ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas.

2358 Un nombre non négligeable d’hommes et de femmes présente des tendances homosexuelles foncières. Cette propension, objectivement désordonnée, constitue pour la plupart d’entre eux une épreuve. Ils doivent être accueillis avec respect, compassion et délicatesse. On évitera à leur égard toute marque de discrimination injuste. Ces personnes sont appelées à réaliser la volonté de Dieu dans leur vie, et si elles sont chrétiennes, à unir au sacrifice de la croix du Seigneur les difficultés qu’elles peuvent rencontrer du fait de leur condition.

2359 Les personnes homosexuelles sont appelées à la chasteté. Par les vertus de maîtrise, éducatrices de la liberté intérieure, quelquefois par le soutien d’une amitié désintéressée, par la prière et la grâce sacramentelle, elles peuvent et doivent se rapprocher, graduellement et résolument, de la perfection chrétienne. 27

La structure de ce chapitre intitulé “Chasteté et homosexualité” nous semble présenter la structure suivante – en forme d’argument:

A (2357)

Or B (2358)

Donc C (2359)

Un argument est un raisonnement logique selon lequel, si les deux prémisses (A – prémisse majeure – et B –prémisse mineure) sont vraies alors la conclusion est vraie, plus précisément on dit que l’argument est valide; cela ne veut pas dire pour autant que l’argument est un bon argument, voire qu’il est correcte. Plus précisément, ledit argument peut être reconstruit et simplifié comme suit:

  1. À partir des Écritures Saintes, on considère les actes homosexuels comme désordonnés et non acceptables, et doivent de ce fait être évités.

  2. Or il y a des hommes qui vivent sous cette condition.

  3. Par conséquent, les Écritures Saintes les invitent à la chasteté.

Notre travail dans ce chapitre consistera à analyser la première prémisse. En effet, dans cette inférence si la première prémisse est vraie, la conclusion sera rapidement vraie à condition que la deuxième prémisse soit elle aussi vraie. Mais (1) est-il vrai?

Le paragraphe § 2357 commence par une définition de l’homosexualité comme une relation envers des personnes du même sexe, caractérisée par l’attirance sexuelle. Suite à la définition, il est attesté que “sa genèse psychique reste largement inexpliquée” 28 . Puis on ajoute: “…s’appuyant sur la Sainte Écriture, qui les présente comme des dépravations graves” 29 . La conclusion 30 ne se fonde pas sur une compréhension psychique 31 de l’homme mais sur la Sainte Écriture et sur l’interprétation que la tradition a faite de cette dernière. Il nous faut donc revenir sur les principaux textes bibliques pour mieux comprendre la question 32 .

Gn 19,1-29 est sans doute le premier texte où est relatée la conduite des habitants de Sodome vis-à-vis de leurs hôtes. Le texte en question est: “…ils appelèrent Loth et lui dirent: ‘Où sont les hommes qui sont venus chez toi cette nuit? Fais-les sortir vers nous pour que nous les connaissions’” 33 (Gn 19,5) 34 . Le problème réside sur le terme “connaissions” (en hébreu: yada‘) qui peut avoir un sens sexuel.

Dans la Bible d’Alexandrie, Marguerite Harl suit ce même sens lorsqu’elle traduit ledit terme comme suit: “amène-les nous, afin que nous ayons des rapports avec eux 35 ”. Le terme en grec est “συγγίγνομαι” que nous pouvons traduire littéralement par “devenir avec”. De nombreux travaux ont montré que ce texte fut très tôt interprété comme possédant un sens sexuel 36 . Garcia Martinez montre néanmoins dans une étude sur les maux de Sodome, que parmi les maux qui causèrent la destruction de Sodome nous ne pouvons pas y inclure si facilement la sodomie (coït anal). L’auteur suggère que le mal en question chez Gn 19,5 est plutôt lié à la misoxenie 37 (c.a.d. au fait d’haïr les étrangers). Cette lecture est rendue d’autant plus vraie si nous la comparons à Juges 1938. En effet: “les ressemblances sont frappantes, et il existe probablement une dépendance littéraire entre Genèse 19 et Juges 19” 39 . Il est aussi possible de conclure que la sodomie n’est pas ici le mal visé mais plutôt l’acte sexuel désordonné (c.a.d. un acte hétérosexuel peut également être un acte désordonné) et/ou violent, sans que cela implique la réprobation de l’acte homosexuel 40 . Une dernière lecture possible consiste à affirmer que la destruction de Sodome est liée à la généralisation (v. 4) de l’acte violent 41 . Ici encore, il ne s’agit pas d’une question morale 42 . Comme nous l’avons affirmé, l’acte homosexuel comme tel n’est pas forcément visé en Gn 19,5. Mais s’il ne l’est pas dans le livre de la Genèse, dans le Lévitique l’interdiction d’avoir un rapport homosexuel masculin est explicite:

…tu ne coucheras pas avec un homme comme on couche avec une femme; ce serait une abomination 43 . (Lv 18,22)

…quand un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ce qu’ils ont fait tous les deux est une abomination; ils seront mis à mort, leur sang retombe sur eux. (Lv 20,13) 44

Les deux textes, bien que similaires, sont d’ordre différent. Dans le premier, il n’y a pas de condamnation et s’adresse seulement au partenaire actif. Par ailleurs, “on remarquera encore qu’en Lévitique 20, ni la masturbation ni l’homosexualité féminine ne sont mentionnées, ce qui fait sens, car ni l’une ni l’autre ne porte vraiment atteinte au rôle traditionnel du mâle dans une société patriarcale” 45 . Dès lors, on peut penser que le problème réside dans le non-respect de l’étranger et l’acte violent sur ce dernier, voire sur le rôle social de l’homme, mais pas sur l’homosexualité.

Dans l’Épître aux Romains (Rm 1,24-27), Paul attire l’attention des Romains sur le péché des païens, et proclame:

…c’est pourquoi Dieu les a livrés à des passions avilissantes: leurs femmes ont échangé les rapports naturels pour des rapports contre nature; les hommes de même, abandonnant les rapports naturels avec la femme, se sont enflammés de désir les uns pour les autres, commettant l’infamie d’homme à homme et recevant en leur personne le juste salaire de leur égarement (Rm 1,26-27).

Au contraire de Gn 19,1-29, Paul se réfère clairement ici au rapport homosexuel comme étant lui-même impure “ἀχαθαρσίαν” (Rm 1,24) et avilissant “ἀτιμίας” (Rm 1,26), et nous indique pourquoi il est considéré comme tel: le rapport homosexuel est contre nature (“παρὰ φύσιν”). Comme le note Dabourne, le terme διοτί (Rm 1,21) et les verbes en passif en Rm 1,21b indiquent que Dieu a déjà effectué sa punition 46 . Cela veut dire que le διό de Rm 1,24, introduit les punitions qui ont été infligées aux juifs et aux gentils 47 et parmi lesquels nous retrouvons le rapport contre nature. Dabourne souligne aussi que les rapports homosexuels font référence à l’idolâtrie en Rm 1,25 48 . Donc, Paul nous suggère que se pencher et se tourner vers les idoles est la cause du désordre du monde 49 .

Dans 1Co 6, Paul se prononce à propos de ceux qui n’hériteront pas du Royaume de Dieu à cause de leur péchés: “Ne savez-vous donc pas que les injustes n’hériteront pas du Royaume de Dieu? Ne vous y trompez pas! Ni les débauchés, ni les idolâtres, ni les adultères, ni les efféminés, ni les pédérastes” (1Co 6,9). Donc ceux qui sont efféminés (“μαλακοὶ”) n’hériteront pas le Royaume de Dieu. Le terme μαλακός (qu’on peut traduire en français par “mou” ou “doux” 50 ) est utilisé à quatre reprises dans le Nouveau Testament: 2 fois chez Mt 11,8; 1 fois chez Lc 7,25 et 1 fois chez 1Co 6,9. Chez Matthieu et Luc, le terme est utilisé pour parler de l’excellente qualité des tissus utilisés, c’est-à-dire pour dire d’un tissu qu’il est fin. C’est seulement chez 1 Co 6,9 qu’il est possible d’interpréter “μαλακοὶ” en faisant peut-être référence aux personnes homosexuelles, notamment à cause de sa place dans la phrase: il est inséré après les idolâtres, des adultères (“μοιχοὶ”) et des “ἀρσενοκοῖται”. Donc, à partir de Rm 1,26, nous pouvons déduire qu’en 1Co 6,9, c’est l’acte homosexuel qui est visé. En outre, si le terme “efféminé” ne vise pas l’homosexualité, il semblerait que le terme “ἀρσενοκοῖται” fasse référence également aux personnes homosexuelles, et par conséquent à l’acte homosexuel 51 . Ce terme apparaît seulement deux fois dans le Nouveau Testament: 1Co 6,9 et 1Tm 1,10. Dans la première Épitre à Timothée, le terme “ἀρσενοκοίταις” suit “débauché” (“πόρνοις”) et précède “marchands d’hommes” (“ἀνδραποδισταῖς”). Si nous avons voulu éviter de traduire le terme “ἀρσενοκοῖται” 52 , c’est parce qu’il s’agit d’un terme plutôt étrange. Comme le notent Römer et Bonjour, “étymologiquement, arsenokoites a donc une connotation sexuelle indéniable, mais qui ne renvoie pas forcément à l’homosexualité, ni à la pédérastie, mais peut désigner tout comportement sexuel jugé inacceptable” 53 .

Que pouvons-nous conclure de notre analyse de ces textes scripturaires? Tout d’abord, que nous avons parlé principalement des textes classiques. Il y a néanmoins des textes moins classiques pouvant intéresser les lecteurs. De ce fait, on peut souligner l’histoire de David et Jonathan, une histoire – et une relation – ambigüe 54 centrée principalement sur l’amour (et pas sur le sexe sans qu’on puisse pour autant être sûr qu’il n’en est pas question) 55 . Deuxièmement, qu’on ne dit rien sur l’homosexualité féminine.

Si les textes ne sont pas toujours très clairs, il est néanmoins possible d’affirmer que dès l’Ancien Testament nous pouvons retrouver la condamnation de l’acte homosexuel, notamment lorsqu’il est violent. L’importance de Rm 1,26-27 consiste au fait que Paul fournit clairement une raison: l’acte homosexuel est un acte contre nature. Cette condamnation peut être expliquée chez Paul (un juif hellénistique) car l’acte contre nature était une critique visant le monde et les mœurs des Gentils 56 . Nous pouvons néanmoins ajouter que le silence et l’ambigüité des textes bibliques doivent être aussi pris en compte car ni Paul ni les auteurs des autres textes avaient l’intention de créer une éthique chrétienne de la sexualité.

PROBLEME MORAL OU UN TEXTE PROBLEMATIQUE?

Notre étude de la prémisse A nous a confirmé que malgré les ambigüités de quelques textes, la Bible a, en un certain sens, un regard négatif sur les actes homosexuels (notamment chez Paul et chez l’auteur de 1 Timothée). Si nous souhaitons remettre en question les arguments avancés, nous devons établir ce qui est moralement bon. C’est ici même que le projet rencontre le problème principal et son plus grand défi: la théologie morale, puisqu’elle est théologique, fonde son éthique uniquement sur la Bible, sur les lieux théologiques et sur une approche se révélant en contradiction avec les textes mêmes, et porteuse d’un flagrant anachronisme 57 . De ce fait, Römer et Bonjour affirment que “dans le débat sur l’homosexualité dans le contexte des églises, l’argument biblique joue en effet un rôle important, voire décisif. La Bible est très fréquemment citée pour légitimer sa propre position sur la question de l’homosexualité ” 58 .

…le recours à la Bible est une affaire hautement piégée. Les milieux évangéliques et d’autres courants “littéralistes” se réfèrent aux interdictions du Lévitique, à l’histoire de Sodome et Gomorrhe et encore à certaines épîtres de l’apôtre Paul dans le dessein de prouver que la Bible condamne l’homosexualité […] De l’autre côté, des théologiens homosexuels ou sympathisants de la lutte des gays et des lesbiennes s’efforcent de démontrer qu’aucun texte biblique ne s’oppose vraiment à l’amour homosexuel [Or] ces deux types de lectures du texte biblique partagent le même présupposé. La Bible est considérée, dans les deux cas, comme une sorte de manuel utilisable directement, sans aucune médiation, pour légitimer des prises de position d’éthique sexuelle. On oublie alors que plus de deux mille ans nous séparent de la mise par écrit des textes que nous venons d’évoquer […] A cela s’ajoute le problème de l’anachronisme. 59

Or, si les textes bibliques ne sont pas toujours clairs, il existe toute une tradition montrant clairement une condamnation des rapports homosexuels, donc… nous voilà dans une impasse. Est-il possible de surmonter cette impasse? Notre réponse est oui. Pour y parvenir nous exposerons les raisons et les pas à suivre.

Nous souhaitons contribuer aux discussions théologiques en formulant une interrogation: devons-nous nous interroger sur les bien-fondés de cette lecture éthique de la Bible? Discuter sur les bien-fondés consiste à s’interroger sur les bases ou sur le statut de ce qui nous fournit quelque chose. Autrement dit, nous nous interrogerons sur la nature du texte Biblique en tant que texte littéraire. De ce fait, notre projet retourne au point de départ d’un discours théologique, en nous montrant que ce point est fondamental pour une bonne théologie.

Nous proposerons de revenir sur l’interrogation de comment pouvons-nous lire les textes bibliques. Il ne s’agit pas ici d’établir comment interpréter la Bible dans l’Église 60 , ni d’apporter une nouvelle interprétation de la Bible, voire de comprendre les différents sens des Écritures, mais d’aborder une voie – à notre avis peu abordée – du statut cognitif des Écritures 61 .

Ce que nous suggérons dans ce chapitre, c’est de considérer l’existence d’une connaissance biblique, et par conséquent comprendre la Bible comme un récit qui doit être compris comme (1) Révélation (salvifique) et comme (2) genre littéraire. Cela veut dire, qu’elle peut contenir (1) un type de connaissance révélée et (2) un type de connaissance littéraire. Parmi le genre littéraire, celui-ci peut contenir tant (2a) du vrai (2b) que du faux. Ainsi, lorsque Galilée a cru comprendre une cosmologie contraire aux récits bibliques, sa cosmologie ne remettait pas en cause la connaissance révélée mais la connaissance littéraire, en montrant finalement qu’il s’agissait dans les textes en question d’une fausseté littéraire. En outre, l’affaire Galilée 62 nous apporte l’opportunité d’attirer l’attention sur un fait historique qui nous a montré que les lieux théologiques 63 peuvent parfois appuyer une fausseté littéraire de la Bible.

La question que nous traiterons nous l’intitulerons: la connaissance pratique propositionnelle de la bible 64 . Cette conception d’une connaissance biblique, s’inspire de la conception humaniste de la littérature notamment développée par Engel 65 , qui défend “la valeur cognitive de l’œuvre littéraire, sa dimension morale, sa capacité à mettre en scène de grands conflits humains universels et à porter un ‘jugement sur la vie’” 66 .

La connaissance peut être comprise comme:

…la connaissance propositionnelle (savoir que), la connaissance pratique (savoir faire, savoir comment), et ce que l’on pourrait appeler, faute d’une expression plus appropriée, le savoir expérientiel (savoir “comment c’est” ou “quelle effet cela fait” […] Enfin, last but not least, la connaissance de soi, celle qu’on est supposé avoir de soi-même à la première personne. 67

La question est de savoir quel est le lien entre ces connaissances et la connaissance littéraire. Comme Engel le note: “…les discussions qui portent sur la connaissance littéraire ne semblent pas les avoir intégrées facilement” 68 . Par ailleurs, nous nous intéressons ici à la thèse selon laquelle l’œuvre “littéraire peut apporter occasionnellement ou anecdotiquement des connaissances que l’on pourrait acquérir par ailleurs 69 ” et c’est en suivant cette thèse que nous pouvons comprendre que la Bible comme genre littéraire était destinée à apporter occasionnellement ou anecdotiquement des connaissances. Cependant ces connaissances peuvent être apophantique, c’est-à-dire, être porteuse “d’un certain contenu de croyance susceptible d’être articulé sous la forme d’une proposition susceptible d’être évaluée comme vraie ou fausse 70 ”.

Or “qui dit connaissance dit vérité: on ne peut pas savoir des choses fausses (bien qu’on puisse croire les savoir)” 71 , le problème étant que “la fiction s’oppose à la vérité par définition, et par conséquent la vérité ne peut être la catégorie appropriée pour la littérature 72 ” car il est impossible de soutenir que “seul importe le contenu de connaissance indépendamment de la manière dont il est exprimé” 73 . Qui plus est, quelle théorie faut-il adopter: faut-il une théorie correspondantiste de la vérité ou une théorie cohérentiste 74 ? Ou au contraire, devons-nous refuser une théorie cognitiviste de la littérature et adopter une connaissance morale ou pratique?

Nous ne pouvons pas nous abandonner à ces nombreuses questions et discussions. Néanmoins, nous proposerons une théorie qui évite plusieurs des critiques qu’on peut lui adresser. En ce sens, malgré les difficultés que nous pouvons rencontrer, nous soutiendrons qu’il y a une connaissance biblique et nous la définissons comme suit:

Connaissance biblique

Pourquoi l’œuvre biblique peut-elle être une connaissance? Parce que la Bible enferme tant une connaissance révélée qu’une connaissance littéraire. Ces deux vérités, bien qu’elles puissent prendre une forme littéraire 75 , présentent une caractéristique, à notre avis fondamentale: la Bible peut être littéraire mais elle se distingue des œuvres littéraires. Elle se distingue sur le fait que les différents genres littéraires contenus dans la Bible et propres à chaque époque souhaitent apporter une connaissance révélée 76 . Par conséquent, elles ont le souci de transmettre une vérité ou de dire le vrai 77 , voire, transmettre une vérité révélée. De ce fait, l’écrivain de la Bible a comme but premier de transmettre une connaissance par voie anecdotique, allégorique, voire fictionnelle. Elle est en outre corréspondantiste, cette théorie étant définie comme suit: “X est vrai si et seulement si X correspond à la réalité”. Il s’ensuit que l’œuvre biblique vise une forme de vérité objective (notamment à cause de son but premier) 78 .

Le détour que nous avons réalisé, nous a permis de proposer une théorie pratique propositionnelle de la Bible. Cette théorie cherche à nous montrer pourquoi la Bible en tant que genre littéraire peut contenir de connaissances apophantiques. Si nous avons élaboré une théorie de la connaissance biblique, c’est parce qu’il existe à notre avis, un fossé dans l’interprétation littéraire de la Bible et celui-ci correspond à l’absence d’une théorie de la connaissance 79 pour les récits bibliques. Dans la théologie, les chercheurs ont principalement emprunté deux voies: la première est la voie exégétique tandis que la deuxième se réduit toujours à une approche herméneutique.

Dans ce détour, nous avons voulu développer cette partie pour expliquer le point suivant. Le théologien peut se servir de la Bible comme d’un texte pouvant nous fournir une connaissance pratique propositionnelle, de la même façon qu’il pourrait le faire avec un texte littéraire. Nous ne voyons pas un autre moyen par lequel le théologien peut, ou sur quelle autorité, invoquer de textes bibliques pour appuyer une connaissance éthique. Lorsque la question ne relève pas de connaissances révélées, il s’agit d’une connaissance littéraire. Mais toute connaissance littéraire devient dès lors une connaissance pratique littéraire propositionnelle et apophantique, une proposition pouvant être évaluée comme vraie ou comme fausse.

QUELLE SOLUTION?

La solution que nous souhaitons soutenir part du raisonnement suivant:

  1. L’acte homosexuel ne peut être jugé que s’il est une action morale.

  2. Or l’acte homosexuel n’est pas une action morale puisqu’il relève d’un événement génétique et social, et le cerveau est au centre de son explication 80 .

  3. Donc, l’acte homosexuel ne peut pas être jugé moralement.

Cependant, dans un discours théologique et ecclésial, l’argument trouve une autre prémisse nous conduisant à une autre conclusion:

  1. 2’. La Bible condamne moralement l’homosexualité car elle est morale.

Par conséquent

  1. 3’. L’acte homosexuel peut être jugé moralement.

Classiquement, la plupart de théologiens discutant l’homosexualité ajoutent:

  1. 3’’. Dieu est amour.

  2. 4’’. Nous ne pouvons juger notre prochain 81 .

Cependant ni 3’’ ni 4’’ n’ont aucune prétention de rejeter 2’ et par conséquent 3’ reste valide.

Puisque le problème étant que 3’ dépend de 2’, il nous semble que la solution consiste à rejeter 2’, s’il elle est fausse. Pour cela, la première voie explorée consistait à s’interroger sur la véracité de 2’. Cette recherche nous a révélé néanmoins que plusieurs textes bibliques condamnent moralement l’acte homosexuel. C’est pourquoi nous avons jugé que la seule voie possible pour rejeter 2’ consistait à remettre en question le fondement de 2’, c’est-à-dire son statut. Plus précisément, notre argument est le suivant:

La Bible contient tant de connaissances révélées et de connaissances littéraires.

Cet argument cherche seulement à montrer que les textes bibliques peuvent être aussi rejetés à cause de leur fausseté. L’exemple le plus célèbre 82 qui illustre notre raisonnement est l’affaire Galilée, où l’on trouve un texte biblique contredisant clairement une connaissance scientifique. L’affaire Galilée nous montre ainsi un problème simple: la Bible peut contenir tant de connaissances révélées que de connaissances littéraires. Or comment peut-on juger la fausseté, lorsque le doute surgit? Nous proposons les critères suivants:

  1. - Principe fondamental [PF]: En vérifiant que la proposition en question (e.g. “la terre tourne autour du soleil”), ne contredit pas les vérités dogmatiques et essentielles de notre foi (connaissances salvifiques).

  2. - Principe ecclésial [PE]: En vérifiant ce que la communauté ecclésial pense au sujet de la proposition.

  3. - Principe scientifique [PS]: En vérifiant que la proposition en question n’est pas en totale contradiction avec nos connaissances scientifiques 83 .

Le premier principe est fondamental puisqu’il est dogmatique, et il défend ce qui est essentiel à notre foi. Cependant PE et PF sont deux principes forts mais pouvant être rejetés.

À ce stade, celui d’une confrontation entre 2 et 2’, il nous a semblé qu’il s’agit ici clairement d’une opposition entre deux types de propositions contradictoires. Nous soutenons la véracité de 2 et nous ferons appel à PS pour être à l’encontre du PE 84 . Par conséquent nous soutiendrons que 3 l’homosexualité ne peut pas être jugée moralement.

Quelle est donc notre solution? Les pas à suivre dans un raisonnement pastoral et théologique, restent à travailler 85 (e.g. communion, mariage, adoption). Notre solution a consisté à signaler qu’il est tout à fait possible de rejeter 2’, c’est-à-dire la proposition selon laquelle “la Bible condamne l’homosexualité car elle est morale”. Si nous rejetons 2’, c’est parce qu’elle ne correspond pas à la réalité ii 86 , plus précisément elle contredit les données scientifiques qui nous montrent un aspect de cette réalité. Par conséquent, nous considérons que le PS peut être un principe capable de nous permettre de rejeter une proposition littéraire biblique afin de la considérer comme fausse. Notre solution a été alors méthodologique, au sens qu’en se fondant sur plusieurs principes de travail, nous avons plaidoyé pour rejeter 2’, après avoir étudié cette question dans un perspective exégétique. Cette solution est-elle théologique? Oui, mais à un premier stade, au sens qu’il est fondamental pour pouvoir travailler la question. Il ne s’agissait pas de montrer qu’il existe plusieurs textes (a, b, c et d) qui montrent que l’acte homosexuel n’est pas moralement mauvais mais plutôt de rejeter l’accusation, de lui enlever sa valeur de connaissance et de vérité. Cela n’aurait pas été possible sans suivre les étapes que nous avons entreprises, ce qui nous a permis finalement de penser à une solution alternative.

L’HOMOSEXUALITE AU TRAVERS DU PRISME DES SCIENCES COGNITIVES

Ayant exploré le sujet d’un point de vue théologique nous avons voulu montrer que le problème se situe dans une perspective méthodologique et dans un raisonnement pouvant être rejeté. Notre solution a consisté à soutenir (2) l’acte homosexuel ne peut être jugé moralement car il relève d’un événement génétique et social, et le cerveau est au centre de son explication. De ce fait, nous souhaiterons argumenter en montrant comment les sciences cognitives appuient cette compréhension de l’homosexualité.

Nous nous intéresserons dans ce paragraphe à l’évolution de la question au sein des sciences cognitives pour comprendre comment et pourquoi les neurosciences se sont intéressées à cette question. C’est pourquoi nous avons jugé important de commencer par une thèse très controversée, la thèse du “gène gay”. Celle-ci fut la conclusion – trompeuse – à laquelle de nombreuses personnes sont arrivées après avoir eu connaissance d’une étude publiée dans la revue Science, dans laquelle les chercheurs montraient le rôle des gènes dans l’orientation masculine à partir d’une analyse du pedigree de 114 familles au sein desquelles il y avait des hommes homosexuels 87 . La conclusion de ladite étude fut que:

…le locus q28 du chromosome X devait abriter un gène (non identifié dans cette étude) dont une version prédisposait à l’homosexualité masculine, et que ce gène pouvait expliquer partiellement (en combinaison avec d’autres facteurs génétiques et environnementaux) l’occurrence de l’homosexualité chez une partie des hommes concernés. 88

Cependant, les médias exagérèrent les résultats et annoncèrent la découverte du gène gay malgré les dénégations de Dean Hamer 89 . Les conclusions furent alors instrumentalisées par les différents groupes d’intérêts, comme l’a pu signaler Franck Ramus:

Dans le camp conservateur, certains virent dans la découverte d’un “gène gay” un moyen de se débarrasser de l’homosexualité, d’autres dénigrèrent le résultat parce que pouvant suggérer que l’homosexualité était naturelle, alors que selon eux “l’homosexualité est un choix, et un mauvais choix”. Symétriquement, une partie des groupes homosexuels virent là une confirmation du sentiment qu’ils n’avaient jamais choisi d’être homosexuels, qu’ils l’avaient toujours été, qu’ils l’étaient par nature ou par la main de Dieu (en fonction de leurs croyances); mais d’autres s’insurgèrent contre cette manière de “biologiser” et de médicaliser leur condition, et contre les intentions eugénistes supposées des auteurs de l’étude. 90

On n’en est cependant pas resté là. Franck Ramus suggère que l’effet secondaire fut la diminution de la recherche sur l’orientation sexuelle sans oublier qu’on ait négligé l’homosexualité féminine 91 . Malgré cela, de nombreuses thèses virent le jour: l’orientation sexuelle comme héritée 92 ou liée au nombre de grands frères 93 . Elle a été aussi vue comme un phénomène présent seulement chez l’homme et quelques fois lié à la gestation 94 .

Dans la psychologie et la biologie, il y a eu aussi tout un courant (notamment dans la psychologie évolutionniste) qui perçut l’homosexualité comme un paradoxe darwinien, quelques fois dépendant d’une construction sociale 95 . La question se place alors entre la “nature” et la “culture”, question qui trouva son apogée vers les années 1950 96 . Or, ce sera le neuroscientif turn 97 qui engendra de nombreuses espérances quant à la recherche scientifique de l’homosexualité. Ce nouveau tournant influencera considérablement la recherche et la compréhension de l’homosexualité.

Il faut néanmoins rester très attentif à une certaine tendance dans les neurosciences de croire tout expliquer, voire d’avoir tout résolu. Or, si leur apport peut être considéré comme crucial pour la compréhension de nombreux de ces mystères, elles n’ont pas dit leur dernier mot. Cela étant dit, nous procéderons à souligner quelques aspects de la recherche neuroscientifique sur l’homosexualité.

LA DEMYTHOLOGISATION DE L’HOMOSEXUALITE

Parmi les nouveaux travaux réalisés autour de l’homosexualité, nous pouvons trouver une thèse qui attire l’attention de nombreux chercheurs et que nous avons signalé au fur et à mesure de cette étude. Il s’agit de l’idée que “l’orientation sexuelle est en grande partie déterminée par des facteurs biologiques” 98 . La réaction à cette idée n’est néanmoins pas toujours positive: “au mieux on vous rit au nez, au pire on vous traite de nazi et d’homophobe. Selon la formule consacrée au sein du petit monde intellectuel français, une telle hypothèse rappellerait ‘les heures sombres de notre histoire’” 99 . Cette idée, plus qu’une simple proposition de la science, est l’état actuel de ce que la science nous révèle sur l’homosexualité. Cette proposition peut-elle être négligée?

Récemment, le président d’Ouganda, Yoweri Museveni, promulgua une nouvelle loi contre l’homosexualité 100 , qui attira l’attention du milieu scientifique. En effet, cette nouvelle loi se voulait porte-parole des dernières données de la science 101 . La réponse de la part de la communauté scientifique ne s’est pas fait attendre: l’Académie des sciences de l’Afrique du Sud rendit un rapport, qui se conclut comme suit:

Le rapport conclut qu'il y a des influences biologiques substantielles sur la diversité des sexualités humaines et en particulier des orientations sexuelles. Des études ont trouvé des liaisons significatives entre orientation sexuelle masculine et certaines régions du chromosome X. Cette région particulière du chromosome X est également associée à d'autres éléments du développement sexuel. Ces découvertes, publiées initialement en 1993 et confirmées en 2014, associent directement un caractère particulier (l'orientation homosexuelle) au matériel génétique, pour au moins une partie des hommes homosexuels.

Bien qu'elle soit moins étudiée, il y a aussi des données considérables en faveur d'une composante biologique à l'orientation homosexuelle chez les femmes.

Les autres conclusions du rapport sont:

Aucune donnée n'a pu être trouvée à l'appui de l'idée que l'orientation sexuelle puisse être acquise par contact avec des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres ou intersexes (LGBTI).

Il n'y a pas de preuves à l'appui de l'idée que la manière dont les parents élèvent leurs enfants, ou que les relations formées entre enfants et parents, aient un impact sur l'orientation sexuelle.

Il n’y a aucune preuve que l'orientation sexuelle puisse être modifiée par “conversion” ou par thérapie “réparatrice”.

Il n’y a aucune donnée établissant un lien entre l’orientation sexuelle LGB, ou les personnes transgenre ou intersexuées, et le “recrutement” de jeunes gens par des abus sexuels.

Il y a des données claires montrant que les environnements répressifs augmentent le stress des minorités et ont un impact négatif sur la santé des personnes LGBTI. 102

Les résultats sont marquants. Ces résultats ne doivent en aucun cas suggérer éradiquer l’homosexualité par sélection génétique.

Frank Ramus ajoute que:

…les connaissances scientifiques que l’on a sur les causes de l’homosexualité (quelles qu’elles soient) n’ont pas plus pour effet de rendre l’homosexualité plus désirable ou populaire. Elles n’ont pas simplement pas d’implication du tout sur les jugements (positifs ou négatifs) que l’on peut porter sur l’homosexualité. Elles apportent un regard neutre sur des causes et des mécanismes, mais ne sont porteuses d'aucun jugement de valeur. Le rapport de l’académie des sciences d’Afrique du Sud permet avant tout de démonter un argumentaire faussement basé sur la science. 103

Cependant, est-il possible de conclure que ces connaissances n’ont aucune influence sur les jugements des personnes (et les jugements sur les personnes)? Cela est sans doute faux. Il nous semble, au contraire, qu’elle joue un rôle important et crucial: celui de démythologiser l’homosexualité.

Afin de démythologiser l’homosexualité, nous présenterons rapidement quelques-unes des principales conclusions auxquelles la science est parvenue dans ces dernières années et qui montrent que l’homosexualité est tout d’abord un phénomène biologique (génétique). En effet, quelques études récentes montrent qu’être un homme ou être une femme peut être quelque chose de plus compliqué que ce que l’on pense; quelques cas de Disorders of Sex Development (DSD) en témoignent 104 . Ces différences génétiques se traduisent en une claire différence neurobiologique 105 . Autrement dit, il existe de différences entre le cerveau de l’homme et celui de la femme 106 , lequel est un résultat des hormones stéroïdiennes, y compris la testostérone, les œstrogènes et la progestérone 107 . C’est un processus logiquement long qui commence in utero et qui va jusqu’à la puberté. Cela n’implique pas que l’environnement externe, social et culturel, ne joue aucun un rôle important, bien au contraire 108 . Depuis les travaux de Vidal centrés sur l’hypothalamus, sa structure continue à être étudiée afin de comprendre son importance et son influence. Il y a déjà eu jusqu’aujourd’hui de nombreuses controverses sur le fait de savoir si l’hypothalamus joue ou non le rôle que l’on veut lui attribuer 109 . Tous ces travaux augmentent notre compréhension – neurobiologique – de l’homosexualité. Des précisions restent à apporter mais il est impossible aujourd’hui de négliger les résultats de travaux menés pour comprendre l’homosexualité comme un résultat génétique et social.

CONCLUSION

Au terme de cette étude, qui n’est qu’exploratrice, nous devons nous interroger s’il est possible de conclure que l’orientation homosexuelle est une “dépravation grave” ou que “les actes d’homosexualité sont intrinsèquement désordonnés” et que ces actes “sont contraires à la loi naturelle 110 ”, voire qu’ils “ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable”?

Tout d’abord, l’homosexualité ne peut pas être comprise comme une dépravation. Le mot “dépravation” du latin depravatio qui se traduit par “torsion”, “corruption”, “altération”, est un terme qui désigne une “corruption de la nature”. Cependant lorsqu’on parle de dépravation sur le plan sexuel, on veut faire référence à une conduite immorale, à un acte qui irait contre la nature. Lorsqu’on entre dans le plan moral, il faut se demander pourquoi un acte est moralement mauvais. Le texte du catéchisme semble fournir quelques raisons pour lesquelles nous pouvons considérer l’acte homosexuel comme un acte moralement mauvais: (i) c’est un acte désordonné, (ii) c’est contraire à la loi naturelle et (iii) ne procède pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable.

Les travaux menés dans la biologie et les sciences cognitives nous montrent aujourd’hui le rôle crucial de nos gènes et de l’environnement externe qui nous invitent à penser l’homosexualité autrement. Sans doute être homme ou femme est un phénomène qui reste encore à expliquer entièrement mais de nombreuses pistes nous révèlent déjà quelques-unes de ces caractéristiques permettant de conclure aujourd’hui qu’il ne s’agit pas d’un acte désordonné, et ne procédant pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Cette idée a été récemment développée par le théologien Adriano Oliva 111 qui soutient à partir d’une lecture audacieuse de Thomas d’Aquin que l’homosexualité relève de l’âme et non du corps, là où s’expriment l’affection et l’amour 112 . Sans doute s’agit-il d’une bonne piste, mais il nous semble qu’aujourd’hui, nous devons construire une anthropologie qui prenne en compte les termes de notre époque.

Les textes bibliques ne peuvent pas être, dans ce cas, la base de l’argument – moral – contre l’homosexualité. Seule une compréhension dépendant de la science peut avoir une valeur de vérité sur un phénomène qui est loin d’être contre nature ou désordonné. Ces connaissances sont en train de créer un nouveau paradigme pour comprendre sous un nouvel angle la loi naturelle 113 .

Concluons en rappelant que toutes les personnes sont des 114

… “fils de Dieux puisqu’ils sont fils de la résurrection” (Lc 20,36), “comme des anges dans le ciel” (Mc 12,25). “[où] il n’y a plus ni Juif ni Grec; il n’y a plus ni esclave, ni homme libre; il n’y a plus l’homme et la femme; car tous, vous n’êtes qu’un en Jésus Christ. Et si vous appartenez au Christ, c’est donc que vous êtes la descendance d’Abraham; selon la promesse, vous êtes héritiers (Ga 3,2-28).

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Notes

* Article d’investigation

1 Pour comprendre ce que sont les sciences cognitives, voir Andler, Introduction aux sciences cognitives.

2 Sur une description de la neuro-théologie, voir: Newberg, Principles of Neurotheology; Illes et Sahakian, The Oxford Handbook of Neuroethics.

3 Nous aurons voulu y faire intervenir la métaphysique dans cette recherche interdisciplinaire, mais pour de raisons de simplicité et étant donné la difficulté de ces questions, nous laisserons de côté ces questions proprement philosophiques. Voir par exemple: Mikkola, “Feminist Perspectives on Sex and Gender”; Haslanger, “Feminist Metaphysics”.

4 Xavier Thévenot invitait déjà à son époque le lecteur à envisager cette question en lien avec la science (Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne, 127ss.).

5 Lors de la rédaction finale de ce texte, nous avons découvert les travaux de Neil Messer qui explorent la littérature biologique et son influence dans l’éthique. Voir: Messer, “Contributions from Biology”, 69-87; et Messer, Theological Neuroethics. Christian Ethics Meets the Science of the Human Brain.

6 Il faut noter que le terme est sujet à controverse. En effet, le terme apparaît pour la première fois en 1869, dans un texte anonyme attribué à K. Kerteby (son pseudonyme était K. M. Benkert ; cfr. http://www.cnrtl.fr/etymologie/Homosexualit%C3%A9). Pour Laurent Lemoine, le terme ferait référence à la dimension sexuelle, plus précisément génitale, approche qui serait réductrice. C’est pourquoi Lemoine propose les termes “homoérotisme” ou “homosensualité”. Nous considérons que les deux termes proposés par Lemoine sont eux aussi sujet à controverse. Nous laisserons néanmoins de côté cette question et nous retiendrons le terme “homosexualité” pour parler de l’orientation sexuelle d’un homme pour un homme et d’une femme pour une femme.

7 Pour une histoire de l’homosexualité, voir: Aldrich, Une histoire de l’homosexualité.

8 Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 9. Intolérance, selon Balthazar suscitée notamment par les judéo-chrétiens (ibid.). Aujourd’hui l’homosexualité reste considérée comme un délit dans de nombreux pays (voir, Le Monde, “L’homosexualité, un crime dans de nombreux pays d’Afrique et du Moyen-Orient”).

9 Un après que la France ait retiré l’homosexualité de les listes de maladies mentales. Par ailleurs, en 1789 l’homosexualité était passible de mort. Voir aussi Verbeke, “La lente avancée des droits pour les homosexuels en France”.

10 Tamagne, “La déportation des homosexuels durant la Seconde Guerre mondiale”, 77-104.

11 Eagly et Wood, “The Nature-Nurture Debates: 25 Years of Challenges in Understanding the Psychology of Gender”, 1-18.

12 Lemoine et Sed, “Éditorial”, 5.

13 Lemoine, “Homosexualité”, 1091.

14 Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 14.

15 Balthazar souligne: “Cependant, même si on pouvait démontrer formellement que l’homosexualité est déterminée par des facteurs biologiques (génétiques ou hormonaux), le sentiment de culpabilité parentale risque d’être toujours présent. Les parents restent, dans cette explication, indirectement responsables de l’orientation sexuelle de leur enfant via les gènes qu’ils lui ont transmis soit via le milieu hormonal que la mère a ‘crée’ pour son enfant lorsqu’il était embryon. Ce type de responsabilité est cependant complètement différent” (Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 14).

16 Par ailleurs Balthazar affirme: “Certains homosexuels revendiquent le fait que leur orientation est le résultat d’un choix personnel, ce qui conforte la notion de responsabilité de l’homosexuel sans son style de vie et son orientation […]. Il n’est donc pas à exclure qu’il existe parmi les homosexuels des individus qui pour des raisons diverses ont choisi leur orientation sexuelle. Il s’agit très probablement d’une minorité de cas et pour la vaste majorité des sujets, l’orientation homosexuelle du comportement s’impose à l’individu indépendamment de tout choix” (Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 15). Il est cependant tout à fait possible de voir dans le choix un phénomène, une espèce d’illusion due au fait que l’acceptation de l’homosexualité ne vient que progressivement (voire jamais).

17 Cette phrase est sans doute forte et provocatrice mais la thèse défendue est néanmoins correcte. Elle consiste à défendre l’aspect génétique, sans pour autant négliger le rôle culturel.

18 Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 10.

19 Voir à ce sujet, Mazaleigue-Labaste, Les déséquilibres de l’amour. La genèse du concept de perversion sexuelle, de la Révolution française à Freud.

20 Ibid. Le terme “pénétrance” en génétique “est la proportion d’individus porteurs d’un caractère génétique donné qui exprimeront le phénotype correspondant” (Balthazart, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 9, N. 1).

21 Homme et femme.

22 Balthazart, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 10.

23 Un évaluateur nous renvoie vers les travaux de Judith Butler et Michel Foucault, auteurs remettant en question l’approche psycho-analytique traditionnel. Nous ne pouvons pas néanmoins développer ici l’intérêt et la pertinence de ces travaux. Nous renvoyons le lecteur vers le travail de Mazaleigue-Labaste, Les déséquilibres de l’amour. La genèse du concept de perversion sexuelle, de la Révolution française à Freud.

24 Il est aussi possible de penser à Persona humana de Paul VI, mais celle-ci renvoie également aux textes bibliques et à la question de la procréation humaine. Un théologien comme Xavier Thévenot situe par exemple la pensée théologique autour de Thomas d’Aquin, Alphonse Liguori et la Tradition. Tous ces trois partagent néanmoins un point commun: la réprobation biblique (Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne, 239).

25 Les églises protestantes partagent également cette conviction. Voir: Zwilling, “Concilier unité de référence et diversité de convictions: exégèse biblique et homosexualité dans les églises protestantes françaises”, 219-244.

26 Église Catholique, “Catéchisme de l’Église Catholique” 10.

27 Ibid. 2357-2359.

28 Ibid. 2357.

29 Ibid.

30 “…ils sont contraires à la loi naturelle. Ils ferment l’acte sexuel au don de la vie. Ils ne procèdent pas d’une complémentarité affective et sexuelle véritable. Ils ne sauraient recevoir d’approbation en aucun cas” (ibid.).

31 Il est intéressant de souligner le terme “psychique” ayant un lien avec l’interprétation neo-freudienne des désordres sexuels, et par conséquent avec une conception anthropologie selon laquelle la “psyché” semblerait expliquer de nombreux mystères du comportement humain. Dès lors, ne faudrait-il pas s’intéresser à une compréhension biologique et neuroscientifique de l’homme?

32 Avant d’entrer dans cette question, il est important de faire référence au travail de Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible. Comme Römer et Bonjour le signalent, les civilisations mésopotamiennes et égyptiennes ont sans doute influencé la civilisation israélienne. Ainsi, l’homosexualité a pu être condamnée comme un acte de violence en Mésopotamie sans qu’elle puisse être condamnée d’un point de vue moral (Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 44).

33 Nous soulignons. Sauf indication nous suivons la Traduction œcuménique de la Bible (TOB).

34 Voir: Carrez, Nouveau Testament Interlinéaire grec-français.

35 Harl, La Bible d’Alexandrie 1, 178.

36 Voir: Garcia Martinez, “Sodom and Gomorrah in the Targumim”, 83-96; Vandermeersch, “Sodomites, Gays and Biblical Scholars. A Gathering Organized by Peter Damian ?”, 149-172; Meredith, “Les lignes qui quadrillent Sodome: sexualité, espace, hétérotophie en Genèse 19”, 153-173.

37 Nous traduisons le terme anglais misoxenia par “misoxenie”. Garcia Marquez suit les travaux de M. J. Mulder. Voir: Garcia Marquez, “Sodom and Gomorrah in the Targumim”, 90-91; et Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 56-63. 38 “Par contre, il existe aussi une grande différence entre les deux récits […] en Juges 19 la concubine meurt d’avoir été ‘connue’ toute la nuit par les habitants de Guivéa […] [donc] Ce qui est en cause, c’est la violence et la brutalité des agresseurs […]. L’auteur de cette histoire morbide dénonce le non-respect du devoir de l’hospitalité qui culmine dans le viol” (Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 60).

39 Ibid., 59.

40 Comme Mérédith le souligne: “…nous avons été informés d’une troisième possibilité exégétique: l’aspect sexuel de l’histoire ferai en fait référence à la pratique historique attestée à la fois martiale et xénophobe du viol masculin. Selon ce point de vue et dans le contexte culturel d’origine du récit, cette violation génitale fonctionne comme une forme de renversement de genres, ayant vocation à humilier et déviriliser les étrangers plutôt qu’à satisfaire un désire” (Meredith, “Les lignes qui quadrillent Sodome: sexualité, espace, hétérotopie en Genèse 19”, 163).

41 Je dois cette interprétation à Maria Zafeiropoulou.

42 Nous pourrons nous interroger si le problème ne réside pas sur le fait que sa généralisation est un signe d’une fausse communion, voir aussi ce problème de la généralisation et de la fausse communion dans Gn 11,1-9.

43 Voir aussi: Lv 20,12. En outre, il est tout à fait possible de retrouver nombreuses références à l’acte homosexuel de manière péjorative dans l’Ancien Testament; voir : Schmidt, Straight & Narrow? Compassion and Clarity in the Homosexuality Debate.

44 Il y a d’autres interdits comme la prohibition de rapports sexuels pendant les règles de la femme (Lv 20,18)

45 Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 46.

46 Dabourne, Purpose and Cause in Pauline Exegesis: Romans 1.16-4.25 and a New Approach to the Letters, 52.

47 Ibid., 51-52.

48 Ibid ., 52; voir aussi : Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 116-117.

49 Linebaugh, God, Grace, and Righteousness in Wisdom of Solomon and Paul’s Letter to the Romans, 99; voir aussi: Dabourne, Purpose and Cause in Pauline Exegesis: Romans 1.16-4.25 and a New Approach to the Letters.

50 Voir: Bailly, Abrégé du dictionnaire grec-français. Il est important de souligner que Bailly ne suggère aucune connotation sexuelle.

51 Voir: Keener, 1-2 Corinthians, 54-55.

52 Qu’on traduit souvent par “pédéraste”.

53 Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 118-119.

54 Voir aussi le travail de Philippe Lefebvre nous invitant à ne rien fonder sur ce que les textes ne disent pas (Lefebvre, “David et Jonathan: un homme rencontre un homme”, 199-214).

55 Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible, 110.

56 Ibid., 120.

57 D’un côté, il ne faut pas lire un texte, tout en négligeant d’autres textes de plus d’importance qui invitent le lecteur à l’amour et à l’accueil de son prochain. D’un autre côté, l’anachronisme est frappant lorsque nous voulons transposer nos inquiétudes d’aujourd’hui sur de textes d’autres époques, sans prendre en compte leur contexte et leur message. Voir à ce sujet: Wenin, “Human et nature, femme et homme: différences fondatrices ou initiales? Réflexions à partir de création en Génèse 1-3”, 401-420; Römer et Bonjour, L’homosexualité dans le Proche-Orient ancien et la Bible.

58 Ibid., 8 [nous soulignons].

59 Ibid., 9. En outre, il est important de souligner les travaux portant sur l’homme et la femme dans la Bible et de leur relation. Ainsi André Wenin établit: “…rien dans le texte hébreu n’oblige à penser que cet être nommé ha’adam soit de sexe masculin. Eu égard au sens du mot dans les lignes précédentes (1,26-27), ce serait même plutôt le contraire” (Wenin, “Human et nature, femme et homme: différences fondatrices ou initiales? Réflexions à partir de création en Génèse 1-3”, 411). Qui plus est: “…lorsque le créateur constate au v. 18 qu’il n’est pas bien que l’humain soit ‘à son isolment’ (lebaddô) et qu’il décide de remédier au problème en ‘faisant pour lui un secours comme son vis-à-vis’ (‘ézèr kenègdô”)” (ibid., 412). “…une telle lecture me semble non seulement tenir compte de l’ensemble des éléments du récit, mais aussi prendre au sérieux les mots et les métaphores en mettant en évidence une possible signification anthropologique d’images apparemment naïves” (ibid.).

60 Voir: Pontificia Commissione Biblica, “L’interpretazione della Bibbia nella Chiesa”; voir aussi: Commission Théologique Internationale, “La théologie aujourd’hui: perspectives, principes et critères”.

61 Nous spécifierons ce terme par la suite.

62 Nous sommes conscients que l’affaire Galilée est beaucoup plus complexe que nous le montrons ici. Pour notre propos, nous résumerons l’affaire Galilée pour en tirer une leçon.

63 En effet, la Bible, la tradition apostolique, le magistère de l’Église et la communauté des théologiens appuyaient la position contraire de Galilée!

64 Elle est pratique, car une connaissance propositionnelle de la littérature, “nous semble le plus improbable, non pas seulement […] parce qu’il semble absurde de soutenir que le discours fictionnel puisse exprimer des vérités, mais aussi parce qu’on ne voit pas, si la connaissance littéraire pouvait être exprimée par des propositions, en quoi elle pourrait bien consister” (Engel, “Trois conceptions de la connaissance littéraire: cognitive, affective, pratique”, 124-125).

65 Engel, Les lois de l’esprit. Julien Benda ou la raison, 223; Engel, “Trois conceptions de la connaissance littéraire: cognitive, affective, pratique”.

66 Engel, Les lois de l’esprit. Julien Benda ou la raison, 223.

67 Ibid., 224.

68 Ibid.; Engel, “Trois conceptions de la connaissance littéraire: cognitive, affective, pratique”.

69 Engel, Les lois de l’esprit. Julien Benda ou la raison, 224. Nous avons coupé la prière de Pascal Engel et à cause de cela, la thèse présentée ici s’éloigne en quelque sorte de la sienne.

70 Engel, “Trois conceptions de la connaissance littéraire: cognitive, affective, pratique”, 124.

71 Engel, Les lois de l’esprit. Julien Benda ou la raison, 225.

72 Ibid., 226.

73 Ibid., 227.

74 Cette thèse est signalée par Engel en faisant référence aux travaux de Musil. Voir: Engel, Les lois de l’esprit. Julien Benda ou la raison, 230.

75 Sans que “fiction” implique “irréel” mais plutôt “création de l’imagination” (cfr. http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/fiction/33587?q=fiction#33530)

76 Néanmoins, nous ne réduisons pas n’identififions la révélation à un contenu propositionnel.

77 Une vérité essentielle à la valeur cognitive (voir Engel, “Littérature et connaissance pratique”).

78 Il nous semble que, dans certains cas, la connaissance relève d'une connaissance pratique par déférence (Engel, “Littérature et connaissance pratique”). Cette connaissance, Engel la définit comme suit: “Ce que les œuvres de fiction nous donnent ne sont pas des connaissances pratiques directes – des capacités, des aptitudes – mais uniquement ces capacités décrites sous des modes pratiques de présentation. Autrement dit, elles ne nous disent pas comment Φ-er, mais elles décrivent, par un mode de représentation indirect, mais néanmoins démonstratif, comment Φ-er. Ce faisant elles nous donnent quand même une aptitude pratique, l’aptitude à reconnaître et à imaginer comment Φ-er78” (Engel, “Littérature et connaissance pratique”).

79 Une excellente tentative à notre avis est celle de Marcel Viau qui contribua de manière considérable à l’épistémologie (théorie de la connaissance) de la théologie pratique. Voir : Viau, “Pratique: un concept en discussion”, 21-34.

80 Il nous semble que cette prémisse ne peut en aucun cas conduire à parler de l’homosexualité comme disability, tel que R. Swinburne le fait. En effet, il reconnait d’une part l’évidence du rôle joué par la génétique et l’environnement mais propose d’autre part de conclusions contradictoires et s’opposant à cette prémisse. Voir l’intervention de Richard Swinburne à la Midwest Society of Christian Philosophers Conference (2016), “Christian Moral Teaching on Sex, Family and Life”.

81 3’’ et 4’’ sont souvent présentées sous différentes formes.

82 Nous soutenons néanmoins que Galilée a été jugé pour d’autres raisons. Cependant l’affaire Galilée montre bien la confrontation entre Bible et science.

83 Ce principe doit avoir également d’autres principes régulateurs. Nous pouvons énoncer quelques-uns de ces principes, dont nous empruntés à C. Tiercelin pour notre propos: la science n’est pas un guide infaillible; la science a besoin d’autres sciences (comme la métaphysique) pour l’interprétation de ses théories et la science doit adopter un réalisme scientifique; voir: Tiercelin, La métaphysique et les sciences: Les nouveaux enjeux.

84 Si nous rejetons PE, c’est parce qu’il se fonde selon notre argumentation sur une connaissance littéraire pouvant être évaluée comme fausse.

85 Ils n’ont pas été traités pour de raisons d’espace et en raison des objectifs fixés dans cette recherche.

86 Et nous soutenons iii en raison de 2.

87 Hamer; Hu; Magnuson; Hu; et Pattatucci, “A Linkage Between DNA Markers on the X Chromosome and Male Sexual Orientation”, 321-327.

88 Ramus, “L’histoire du ‘gène gay’”, 21-29.

89 Ibid.

90 Ibid.

91 Ibid.

92 Camperino-Ciani, Corna, et Capiluppi, “Evidence for Maternally Inherited Factors Favouring Male Homosexuality and Promoting Female Fecundity”, 2217-2221.

93 Bogaert, “Biological Versus Nonbiological Older Brothers and Men’s Sexual Orientation”, 10771-10774.

94 Ramus, “L’histoire du ‘gène gay’”, 21-29.

95 Adriaens, et De Block. “The Evolution of a Social Construction: The Case of Male Homosexuality”, 570-585.

96 Balthazar, Biologie de l’homosexualité. On naît homosexuel, on ne choisit pas de l’être, 27; Eagly et Wood, “The Nature-Nurture Debates: 25 Years of Challenges in Understanding the Psychology of Gender”, 1-18.

97 Littlefield et Johnson, The Neuroscientific Turn, Transdisciplinarity in the Age of the Brain.

98 Ramus, “Quand les bases biologiques de l’homosexualité viennent en renfort de la lutte contre l’homophobie”.

99 Ibid.

100 Le Monde, “En Ouganda, la loi antihomosexualité annulée par la justice”.

101 Ramus, “Quand les bases biologiques de l’homosexualité viennent en renfort de la lutte contre l’homophobie”.

102 Academy of Science of South Africa (ASSAF), Diversity in Human Sexuality. Implications for Policy in Africa, 62. Traduction de F. Ramus, “Quand les bases biologiques de l’homosexualité viennent en renfort de la lutte contre l’homophobie”.

103 Ibid.

104 Ainsworth, “Sex Redefined”, 288-291.

105 Shah, Jessel, et Sanes, “Sexual Differentiation of the Nervous System”, 1306-1327.

106 Il ne s’agit pas pour autant d’aller dans le sens d’une théorie des deux cerveaux.

107 Shah, Jessel, et Sanes, “Sexual Differentiation of the Nervous System”,1325.

108 Ibid.; et Miller et Halpern, “The New Science of Cognitive Sex Differences”, 37-45.

109 Vidal, “Le cerveau, le sexe et l’idéologie dans les neurosciences”, 495-505.

110 Comme Xavier Thévenot le souligne, la loi naturelle s’inspire sur cette question de Paul: “Le qualificatif de ‘contre-nature’ que Paul donne aux relations homosexuelles sera réassumé par la tradition mais celle-ci y inclura des données philosophiques propres à chaque siècle” (Thévenot, Homosexualités masculines et morale chrétienne, 240). De ce fait, une approche scientifique contribue également à cette question.

111 Oliva, Amours. L’Église, les divorcés remariés, les couples homosexuels.

112 En effet lorsqu’Adriano Oliva affirme que l’homosexualité est enracinée au plus profond de l’âme: “…une inclination enracinée dans l’âme, à partir de laquelle s’expriment les affections et l’amour […] l’homosexualité ne peut pas être considérée comme contre nature, bien qu’elle ne corresponde pas à la nature générale de l’espèce” (Oliva, Amours. L’Église, les divorcés remariés, les couples homosexuels, 84). Voir aussi ces conclusions pastorales portant sur le mariage: ibid.; Oliva, “Métaphysique du mariage d’après Thomas d’Aquin”, 239-286.

113 Car en effet si la “loi naturelle” ne se réduit pas à la “nature” (physique, biologique), elle en dépend.

114 Nous empruntons ces textes à Wenin, “Humain et nature, femme et homme: différences fondatrices ou initiales? Réflexions à partir des récits de création en Genèse 1-3”, 401-420.

Notes aux auteurs

a Auteur de correspondance. Courrier électronique: alejotou@gmail.com

Information additionnelle

Comment citer: Pérez, Alejandro. “La Bible, l’homosexualité et les sciences cognitives: Vers une approche interdisciplinaire de l’homosexualité”. Theologica Xaveriana 189 (2019): 1-31. https://doi.org/10.11144/javeriana.tx70.blscva

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